jeudi 24 décembre 2009
Sider Eöhn
Sider Eöhn a été composé début décembre. aussitôt après Ölöhn Sider et dans le même esprit. Cependant, la voix humaine n'y plus simplement associée sans métamorphose aux sons électroniques. Fondue à leur creuset, recréée partiellement ou totalement, elle participe désormais pleinement de leur substance et constitue l'élément central, presque exclusif de cette composition. Sider Eöhn poursuit donc l'exploration entreprise dans Ölöhn Sider et les pièces précédentes, mais ici, selon une logique de la descente et du parcours en profondeur, dans une lumière d'aura.
Ölöhn Sider
Ölöhn Sider, composé début décembre, se situe à la fois dans la perspective des Films D'Ölöhn - lesquels connaîtront d'autres développement en 2010 - et dans la continuité de Chora. Pièce rituel, poème, invocation, cette composition continue d'explorer le dialogue de la voix humaine récitative et des instruments électroniques. La traverse le battement d'une étoile.
jeudi 10 décembre 2009
Morgenstern
Morgenstern, l'Etoile du matin, est la seconde pièce de la série Morgen qui en comprendra cinq. Elle est ici présentée en deux parties avec un film réalisé tout spécialement pour elle. Chant des palpitations et des ruissellements d'étoiles polychromes à travers la nuit, Morgenstern finit par une lueur signal à la lisière de l'avant jour.
mercredi 11 novembre 2009
Chora
Chora, conçue en octobre 2009, est la première composition dans laquelle sont employés des sons naturels captés par caméra numérique. Ils interviennent dans la substance électronique comme éléments à part entière et non comme des commentaires naturalistes, bien qu'ils n'aient pas été transformés. Seul joue l'écho qui leur avait été donné au montage des films ou qu'ils possédaient par eux-même. Chora doit évidemment son titre à l'idée d'espace mais aussi à la proximité du mot grec avec le mot français "choral".
Le film qui accompagne cette pièce musicale a été créé spécialement pour elle, début novembre. Il n'est donc pas une simple illustration mais une substance visuelle qui fait corps intime avec la composition.
Le film qui accompagne cette pièce musicale a été créé spécialement pour elle, début novembre. Il n'est donc pas une simple illustration mais une substance visuelle qui fait corps intime avec la composition.
Psalmis
Psalmis est le troisième des films d'Ölöhn. A la différence des deux précédents, il n'a pas été réalisé dans le but de fournir des échantillons de voix, (bien que certains de ces derniers aient ensuite été employés dans la composition électronique intitulée Chora, aux côtés de sons empruntés à Mormoralis et à Mormoralis Lampa).
Psalmis explore à son tour, plus longuement, le territoire des rituels et des incantations d'Ölöhn, sous la forme d'un itinéraire d'images et de sonorités. Tout comme dans Mormoralis, quelques éléments musicaux empruntés à des compositions antérieures, (Ölöhn, La Seu), viennent souligner la bande sonore initiale d'une fine calligraphie électronique.
Psalmis explore à son tour, plus longuement, le territoire des rituels et des incantations d'Ölöhn, sous la forme d'un itinéraire d'images et de sonorités. Tout comme dans Mormoralis, quelques éléments musicaux empruntés à des compositions antérieures, (Ölöhn, La Seu), viennent souligner la bande sonore initiale d'une fine calligraphie électronique.
Mormoralis Lampa
A peine avais-je achevé Mormoralis que j'ai entrepris de monter un second petit film dÖlöhn, réalisé dans les mêmes conditions et pour les mêmes raisons que le premier. Mormoralis Lampa se présente lui aussi comme une invocation mystérieuse et un poème de la lumière au coeur de l'automne.
Mormoralis
Je désirais constituer des répertoires de sons naturels, dont des voix, afin de les retraiter ensuite par divers moyens électroniques dans le cadre de vastes compositions, et, ne disposant pas d'un enregistreur numérique ou d'un micro relié à mon ordinateur, j'ai décidé de travailler à partir de petits films réalisés pour les uns à l'aide d'un appareil de photo, pour les autres à l'aide d'une caméra numérique. Il suffisait ensuite d'isoler les fichiers audio, de les importer dans le logiciel de composition que j'emploie régulièrement, pour commencer ce nouveau type de création musicale. Courant octobre 2009, j'ai donc commencé ce travail et enregistré ma propre voix en divers lieux de notre appartement, à l'aide de la caméra numérique. Mais en voyant le premier fragment de film tourné de cette façon, l'idée m'est aussitôt venue de faire vivre ces éléments pour eux-mêmes, sous le titre général des films d'Ölöhn, en référence à l'une de mes nouvelles qui a déjà fait l'objet d'une composition en 2007. Pour apporter à ces petits films expérimentaux toute leur étrangeté, j'ai renommé le nom d'Ölöhn dans une langue et une écriture imaginaires, celle de cette île des communications énigmatiques. Ölöhn devenait ainsi : Ö*l+ö?*
Mormoralis est le premier des films d'Ölôhn, nés de ce merveilleux hasard. Rituel invocation, récitation, poème, il ouvre une route dans l'inconnu. Comme dans les films d'Ölöhn qui suivront celui-ci, seul un effet d'écho est ajouté aux sons naturels. Par ailleurs, quelques fragments extraits de la composition Ölöhn, créée au cours de l'été 2007, se superposent à la bande son filmée qu'ils saupoudrent de leur pollen électronique.
Mormoralis est le premier des films d'Ölôhn, nés de ce merveilleux hasard. Rituel invocation, récitation, poème, il ouvre une route dans l'inconnu. Comme dans les films d'Ölöhn qui suivront celui-ci, seul un effet d'écho est ajouté aux sons naturels. Par ailleurs, quelques fragments extraits de la composition Ölöhn, créée au cours de l'été 2007, se superposent à la bande son filmée qu'ils saupoudrent de leur pollen électronique.
mardi 27 octobre 2009
Morgenrot
Morgenrot est une pièce composée en octobre 2009, première d'une série qui s'intitulera Morgen. Elle est ici présentée dans une version vidéo en deux parties. Le film qui l'accompagne a été tourné en avril 2007 tandis que je créais un livre objet destiné à un projet commun dans le cadre d'une association d'écrivains dont je suis membre. Seul le travail de création du livre objet est montré dans cette version. Le film intégral comprend d'autres éléments, en collaboration avec deux amies qui font également de cette association d'écrivains. J'ai tourné seul la création du livre objet, tenant la caméra de la main gauche et peignant de la droite, ce qui n'a pas toujours été facile.
Il m'a semblé que ce processus artistique s'accordait bien avec l'esprit de Morgenrot qui est celui d'une naissance : celle de la lumière aux premiers instants de l'aurore, des couleurs émanant peu à peu de l'avant jour. Je me suis en effet souvenu d'un somptueux et mystérieux petit matin sur les rives du lac Léman où, dès cinq heures, une sorte d'aura de tonalité pâle, entre argent scintillant et gris, avait marqué la fin de la nuit au-dessus des montagnes qui dominent Thonon. Morgenrot est donc aurore du Léman, ouverture progressive de l'espace dans la blancheur immatérielle d'un monde encore désert.
Morgenrot signifie en allemand "l'aurore", et littéralement, "la rougeur du matin". J'ai appris récemment qu'en norvégien ce même mot veut dire : "le désordre du matin", sans doute par allusion à la débâcle des ténèbres. Quant ce moment particulier du premier jour n'évoque aucune désordre mais au contraire une perfection en équilibre pur.
On verra dans le film que le livre objet est créé à partir d'un exemplaire du Voyage au centre de la terre de Jules Verne. Je précise qu'il ne s'agit que d'un mauvais fac simile des éditions Hetzel, fabriqué pour le compte d'une compagnie d'essence qui offrait de tels ouvrages aux automobilistes dans le cadre d'une campagne publicitaire d'été au cour des années 1990. Le livre ici métamorphosé n'a donc aucune valeur bibliophilique et marchande.
Il m'a semblé que ce processus artistique s'accordait bien avec l'esprit de Morgenrot qui est celui d'une naissance : celle de la lumière aux premiers instants de l'aurore, des couleurs émanant peu à peu de l'avant jour. Je me suis en effet souvenu d'un somptueux et mystérieux petit matin sur les rives du lac Léman où, dès cinq heures, une sorte d'aura de tonalité pâle, entre argent scintillant et gris, avait marqué la fin de la nuit au-dessus des montagnes qui dominent Thonon. Morgenrot est donc aurore du Léman, ouverture progressive de l'espace dans la blancheur immatérielle d'un monde encore désert.
Morgenrot signifie en allemand "l'aurore", et littéralement, "la rougeur du matin". J'ai appris récemment qu'en norvégien ce même mot veut dire : "le désordre du matin", sans doute par allusion à la débâcle des ténèbres. Quant ce moment particulier du premier jour n'évoque aucune désordre mais au contraire une perfection en équilibre pur.
On verra dans le film que le livre objet est créé à partir d'un exemplaire du Voyage au centre de la terre de Jules Verne. Je précise qu'il ne s'agit que d'un mauvais fac simile des éditions Hetzel, fabriqué pour le compte d'une compagnie d'essence qui offrait de tels ouvrages aux automobilistes dans le cadre d'une campagne publicitaire d'été au cour des années 1990. Le livre ici métamorphosé n'a donc aucune valeur bibliophilique et marchande.
samedi 8 août 2009
Juillet 2009
En attendant une nouvelle composition longue actuellement en projet et pour laquelle j'ai déjà effectué un certain nombre de recherches sonores d'un genre nouveau, voici une courte pièce pour célébrer les fêtes solaires de l'allégresse estivale. Comme son titre l'indique, cette petite composition date de juillet. Qu'elle soit pou chacun effervescence et liesse dans la clarté du monde !
mercredi 17 juin 2009
Lumière sur Lumière
Ce recueil de cinq pièces s'achève par Lumière sur lumière. L'origine de ce titre est une splendide expression du mystère divin par le Coran, dans la sourate de la lumière. Itinéraire mystique, visitation, incantion, ravissement et prière, action de grâce et d'allégresse, le chant de cette lumière d'outre lumière se glisse à l'orient pur de l'absolu.
dimanche 14 juin 2009
Trajectoires
De tout côté de l'infini, les étoiles lacent leurs appels, trajectoires de lumière qui se tissent entre eux, se croisent, s'éloignent, tourbillonnent, jaillissent, s'intensifient, se scandent avec ivresse, chantent et psalmodient, résonnent, modulent, répandent leur poudre d'or dans l'univers.
Flor Ounra
Flor Ounra est à la fois la fleur du ciel et celle de la lumière. Fleur dans le sens du coeur secret, de son trésor le plus subtil et plus précieux, mais aussi bien celui de floraison et d'épanouissement. La fleur est alors le plus haut degré d'accomplissement d'un royaume intérieur, celui de la lumière jardin clairière dans la forêt du ciel.
mardi 9 juin 2009
Lumina
Cette nouvelle pièce célèbre la lumière en son voyage et ses métamorphoses. dans l'univers infini, son trajet n'atteint aucune limite. Elle est donc virtuellement éternelle. Tour à tour modulation, jaillissement, constellations de timbres sur la harpe de la couleur, signal ténu, fils de son propre vecteur, dispersion dans les zones les plus subtiles du visible en lesquelles elle se reconcentre et s'unit au silence comme une parole ou un chant, elle devient insensiblement immatérielle sans pourtant cesser d'être, aussi fine que le regard et le sourire d'un ange.
lundi 8 juin 2009
Lumière du Le
Cette composition inaugure le mois de juin 2009 par sa référence cryptée au dieu EL, préfiguration mésopotamienne d'Elhoim et de Allah. Père des divinités monothéistes, El crée le monde et se retire ensuite en un séjour céleste écarté du cosmos, afin de goûter un repos métaphysique bien mérité, tandis que son fils, Baal est chragé d'administrer le monde fraîchement créé. Une statue concervée en Syrie le représente sous les traits d'un petit personnage contemplatif assis sur un trône. La modestie d'El n'a d'égale que la grandeur de son entreprise cosmique. Il convenait, à ce point suprême de l'année où la lumière atteint son expansion la plus vaste, de l'honorer d'une composition évoquant le mystère de cette création fondamentale dont j'imagine volontiers qu'elle est précisément un acte de lumière ouvrant les mondes au sein de l'infini. Après avoir déployé l'éventail mystérieux des ondes primordiales, El suscite les unes après les autres des salves de couleurs qui roulent comme des billes ou des gouttes éblouissantes et forment des constellations d'univers semblables aux perles d'un collier. Puis il s'assied dans le fauteuil de l'arrière-monde, comme un peintre qui prend du recul afin d'examiner son tableau et jette en un sourire un ultime trésor de lumière, signature vivante et scintillante de sa création cette fois complète.
mardi 19 mai 2009
Petite Suite
Dans un certaine mesure, la Petite Suite, composée à l'automne 2007, m'apparaît aujourd'hui comme un écho anticipé d'Ama no sode, mais sous une forme nettement plus brève puisque elle n'excède pas 5 minutes 12. Sans autre commentaire, je la donne à entendre telle qu'en elle-même.
lundi 18 mai 2009
Ama no sode
Composée le week-end du 16-17 mai 2009, Ama no sode est la composition la plus récente de ce printemps. En hommage aux floraisons de mai, elle porte le nom d'une variété de pivoine que j'aime particulièrement, aussi bien pour sa beauté spécifique que ces mots étranges dont jamais je n'ai su déchiffrer le véritable sens : Ama no sode. Fleur emblématique, elle apparaît déjà dans un roman composé entre 2000 et 2001, L'Aventure de Ludmilla Nour, que devaient publier les éditions Blanc Silex avant leur faillite inopinée qui mis un terme à ce projet. Voici un extrait de ce roman resté depuis à l'état d'inédit, dans lequel apparaît la mystérieuse Ama no sode :
- « J’ai découvert cette variété en visitant un jardin botanique. La fleur elle-même est d’un grand rouge, et de forme admirable, mais c’est surtout son nom qui m’a saisie. Je le trouvais étrange et solennel comme un fragment de poème inconnu. J’en ignorais le sens, mais je le pressentais dans l’eau indéfinie de cette formule. En la lisant, j’avais le sentiment que je la connaissais, mais à l’état troublé, exactement comme on perçoit l’oscillation d’un objet reflété qu’on ne peut totalement identifier, à la surface d’un lac. Tantôt, un des trois mots montait, se précisait jusqu’à presque livrer la clé de la formule entière, puis se diluait à nouveau et laissait affleurer l’un des deux autres. Je ne parle ni l’italien, ni l’espagnol, et moins encore le portugais, mais je pensais entendre et reconnaître l’extrême condensation d’une de ces langues.
« Chaque fois que je visitais ce jardin, je m’arrêtais devant cette fleur vibrante qui semblait me dire quelque chose que j’étais proche de deviner, sans jamais franchir la frontière de l’élucidation. « Ama no sode » résonnait d’une scansion latine, mais je penchais plutôt pour l’espagnol ou pour le portugais, surtout le portugais, car dans « sode », j’entendais la « saudade », la nostalgie. Je finis par m’imaginer qu’ « Ama no sode » signifiait quelque chose, comme par exemple : « aime moi, mais ne m’apporte pas la nostalgie », ou bien encore, « aime moi mais sache que tu boiras la coupe amère de nostalgie ». Cette interprétation sans aucun doute entièrement inexacte, me convenait bien. Je décidai d’acheter pour l’installer ici un plant d’Ama no sode, si cette fleur magnifique se trouvait par bonheur chez les pépiniéristes. Après avoir cherché longtemps, j’ai fini par trouver ce plant.
« Tu reviendras le voir dans quelques mois. Mais même ainsi, à l’état de buisson cassant, taillé très bas, il correspond au nom qu’il porte. Il ne s’épanouit que vers l’été, longtemps après les fleurs de renouveau. C’est une fleur des journées caniculaires lentement aspirées par le siphon de l’hébétude. Il faut la voir tôt le matin, lorsqu’elle n’a pas bu la rosée, puis dans l’après-midi, en plein vertige de combustion. Elle est alors vraiment fidèle à sa formule telle que je la comprends, d’autant plus forte et plus ardente qu’elle est dans l’amertume de ces énormes heures et de ces luminosités dont on ne sait même plus si elles sont aveuglantes ou simplement exsangues à force d’être intenses.
- « J’ai découvert cette variété en visitant un jardin botanique. La fleur elle-même est d’un grand rouge, et de forme admirable, mais c’est surtout son nom qui m’a saisie. Je le trouvais étrange et solennel comme un fragment de poème inconnu. J’en ignorais le sens, mais je le pressentais dans l’eau indéfinie de cette formule. En la lisant, j’avais le sentiment que je la connaissais, mais à l’état troublé, exactement comme on perçoit l’oscillation d’un objet reflété qu’on ne peut totalement identifier, à la surface d’un lac. Tantôt, un des trois mots montait, se précisait jusqu’à presque livrer la clé de la formule entière, puis se diluait à nouveau et laissait affleurer l’un des deux autres. Je ne parle ni l’italien, ni l’espagnol, et moins encore le portugais, mais je pensais entendre et reconnaître l’extrême condensation d’une de ces langues.
« Chaque fois que je visitais ce jardin, je m’arrêtais devant cette fleur vibrante qui semblait me dire quelque chose que j’étais proche de deviner, sans jamais franchir la frontière de l’élucidation. « Ama no sode » résonnait d’une scansion latine, mais je penchais plutôt pour l’espagnol ou pour le portugais, surtout le portugais, car dans « sode », j’entendais la « saudade », la nostalgie. Je finis par m’imaginer qu’ « Ama no sode » signifiait quelque chose, comme par exemple : « aime moi, mais ne m’apporte pas la nostalgie », ou bien encore, « aime moi mais sache que tu boiras la coupe amère de nostalgie ». Cette interprétation sans aucun doute entièrement inexacte, me convenait bien. Je décidai d’acheter pour l’installer ici un plant d’Ama no sode, si cette fleur magnifique se trouvait par bonheur chez les pépiniéristes. Après avoir cherché longtemps, j’ai fini par trouver ce plant.
« Tu reviendras le voir dans quelques mois. Mais même ainsi, à l’état de buisson cassant, taillé très bas, il correspond au nom qu’il porte. Il ne s’épanouit que vers l’été, longtemps après les fleurs de renouveau. C’est une fleur des journées caniculaires lentement aspirées par le siphon de l’hébétude. Il faut la voir tôt le matin, lorsqu’elle n’a pas bu la rosée, puis dans l’après-midi, en plein vertige de combustion. Elle est alors vraiment fidèle à sa formule telle que je la comprends, d’autant plus forte et plus ardente qu’elle est dans l’amertume de ces énormes heures et de ces luminosités dont on ne sait même plus si elles sont aveuglantes ou simplement exsangues à force d’être intenses.
Chorten
Chorten est une pièce en trois parties dédiée au compositeur italien Giacinto Scelsi chez lequel prédomine le goût des cultures indiennes et tibétaines, et dont la découverte a bouleversé ma conception de la musique en 1989 lorsque j'ai pour la première fois écouté ses oeuvres orchestrales à la médiathèque de Besançon, choisissant par pur hasard le coffret anthologique qui venait d'être publié sous al direction de Luwig Wittenbach. Le choc immédiat de cette oeuvre n'a cessé depuis d'approfondir en moi son itinéraire de timbres et de textures orchestrales vigoureusement tissées dans des pièces aussi bien méditatives que lyriques.
Composée au cours de l'été 2007, Chorten rend un libre hommage à ces oeuvres dont j'aime également l'austérité parfois abrupte et minérale. Cette qualité particulière s'exprime précisément dans la présente composition, bien que son écriture n'imite en rien celle de Giacinto Scelsi.
Composée au cours de l'été 2007, Chorten rend un libre hommage à ces oeuvres dont j'aime également l'austérité parfois abrupte et minérale. Cette qualité particulière s'exprime précisément dans la présente composition, bien que son écriture n'imite en rien celle de Giacinto Scelsi.
samedi 16 mai 2009
Première Nuit
Première Nuit est une composition de l'automne 2007, presque entièrement née d'une improvisation de 17 minutes environ, à laquelle je n'ai fait qu'ajouter quelques nécessaires éléments d'enrichissement aussitôt après le premier jet. Première Nuit est une pure vision voyageuse, celle d'une conscience fascinée offerte à la rosée lumineuse des nuits d'été parfaites. Comme par exemple dans cet extrait d'une nouvelle inédite, intitulée Le Livre m'avait dit :
"Les nuits d’été, il m’arrivait de m’éveiller et de sortir par la fenêtre. Personne n’en savait rien. Je m’asseyais dans le jardin, levais les yeux en direction du ciel, et j’étais la première à contempler la poudre des étoiles, ne sachant pas que bien avant ma vie, tous les regards qui s’étaient laissés prendre et emporter dans le courant des nuits avaient été les seuls et les premiers. La psalmodie paisible d’un crapaud que je ne pouvais voir manifestait le règne du silence. Le dos posé contre le mur, les mains sur les genoux, je souriais comme une statue. Je me livrais sans résistance à la lenteur de ce voyage, jusqu’au moment où je sentais que j’allais m’endormir. J’en revenais plus éblouie que si j’avais fixé sans précautions la force du soleil.
Plus tard encore, ayant gardé cette habitude, il m’arrivait souvent de sortir un matelas sur la terrasse et de passer la nuit devant le ciel qui s’écoulait par mes paupières. D’étranges questions venaient à mon esprit, tout comme les bulles silencieusement formées à la surface d’une eau dormante. Si je voyais distinctement les longues nuées d’étoiles dans les ténèbres absolues, ne voyais-je pas aussi, non moins distinctement, l’étendue sans reflet de ces ténèbres épanouies ? Elles-mêmes étaient une sorte de lumière puisque je les voyais, pensais-je, en m’appliquant à les saisir des yeux. Je me disais soudain : même sans étoiles, sans lune et sans aucune phosphorescence terrestre, l’aveuglement de leur présence aurait encore été vision de leur lumière, et je restais sous cette pensée, les mains posées contre mes seins nouvellement nés. Puis je sombrais dans le sommeil, environnée d’odeur de plantes."
"Les nuits d’été, il m’arrivait de m’éveiller et de sortir par la fenêtre. Personne n’en savait rien. Je m’asseyais dans le jardin, levais les yeux en direction du ciel, et j’étais la première à contempler la poudre des étoiles, ne sachant pas que bien avant ma vie, tous les regards qui s’étaient laissés prendre et emporter dans le courant des nuits avaient été les seuls et les premiers. La psalmodie paisible d’un crapaud que je ne pouvais voir manifestait le règne du silence. Le dos posé contre le mur, les mains sur les genoux, je souriais comme une statue. Je me livrais sans résistance à la lenteur de ce voyage, jusqu’au moment où je sentais que j’allais m’endormir. J’en revenais plus éblouie que si j’avais fixé sans précautions la force du soleil.
Plus tard encore, ayant gardé cette habitude, il m’arrivait souvent de sortir un matelas sur la terrasse et de passer la nuit devant le ciel qui s’écoulait par mes paupières. D’étranges questions venaient à mon esprit, tout comme les bulles silencieusement formées à la surface d’une eau dormante. Si je voyais distinctement les longues nuées d’étoiles dans les ténèbres absolues, ne voyais-je pas aussi, non moins distinctement, l’étendue sans reflet de ces ténèbres épanouies ? Elles-mêmes étaient une sorte de lumière puisque je les voyais, pensais-je, en m’appliquant à les saisir des yeux. Je me disais soudain : même sans étoiles, sans lune et sans aucune phosphorescence terrestre, l’aveuglement de leur présence aurait encore été vision de leur lumière, et je restais sous cette pensée, les mains posées contre mes seins nouvellement nés. Puis je sombrais dans le sommeil, environnée d’odeur de plantes."
Fragment 9-11, 15-16, 18 et 24
Voici une troisième série extraite des Fragments, en attendant la composition de nouvelles pièces. Fidèle à l'esprit général des Fragments, je me contenterai donc de donner ici les notations générales qui correspondent à chacun d'entre eux et peuvent éventuellement en guider l'écoute.
9 – Appels/ en hommage à Central Park in the dark de Charles Ives
10 – Villa de Mystères
11 – Pulsation/forge cosmique
15 – Le lac Biwa en automne
16 – Mouvement ascendant avec résolution stratosphérique
18 - Création/formation d’un univers
24 – Fragments pour un Mystère antique
9 – Appels/ en hommage à Central Park in the dark de Charles Ives
10 – Villa de Mystères
11 – Pulsation/forge cosmique
15 – Le lac Biwa en automne
16 – Mouvement ascendant avec résolution stratosphérique
18 - Création/formation d’un univers
24 – Fragments pour un Mystère antique
samedi 18 avril 2009
Avril 2009 II
Avril 2009 II referme cette série de pièces printanières par une brève composition. Cérémonie de l'éveil et des ouvertures, elle est aussi une pastorale, nimbée de la célébration d'un mystère.
Blossom II
L'épanouissement des cerisiers du Japon trouve une seconde et dernière expression à l'issue de la floraison de cette année dans cette pièce légèrement plus longue que la précédente, principalement composée au Minimoog Voyager Electric Blue qu'accompagne de façon sporadique le Virus TI. Il ne sera pas très difficile aux auditeurs avertis de distinguer les deux instruments car, contrairement à l'usage que j'en ai fait (ainsi que du Little Phatty) dans des compositions précédentes, je n'ai pas ici cherché à fondre les types de sonorités de manière à éviter les éventuelles contradictions dues à la forte individualité des uns et des autres. Toutefois, il arrive que les timbres et les textures du Virus et du Minimoog se ressemblent et se rejoignent de manière inattendue sans que cette similitude provienne d'une imitation des sons Moog par certains registres du Virus. Elle donne alors plutôt le sentiment que le Virus est approché et imité par le Minimoog de façon surprenante, quoique ponctuelle. C'est le cas dans cette pièce aux environs de 2mn 40.
lundi 13 avril 2009
Avril 2009 et Blossom
Voici deux nouvelles pièces de courte durée, (environ 5 minutes l'une et l'autre). Chacune explore à sa manière la poétique des surgissements propre à la nouvelle saison à ses débuts. Avril 2009 sur le mode du foisonnement, Blossom, selon son titre, sur celui de l'éclosion, en référence directe avec la floraison des cerisiers roses du japon dont j'observe chaque année à Lyon le cycle d'épanouissement graduel, de maturations successives de plusieurs vagues de fleurs dont certaines se répandent en impalpable neige mouvante tandis que les suivantes surgissent et se déploient merveilleusement pour à leur tour devenir neige au même ton rose, jusqu'à la dissolution complète du phénomène.
mardi 7 avril 2009
Fleur d'Ivoire : Quatrième partie
La Quatrième et dernière partie de Fleur d'Ivoire pourrait s'intituler "Les Cavernes".
La première d'entre elles coïncide avec l'appartement déjà évoqué dans la partie précédente, appartement auquel s'ajouterait désormais la manifestation sensible de sa puissance de cauchemar. Un thème de retour à l'enfance succède à son paroxysme angoissé, pour aussitôt rejoindre des zones plus ambivalentes qui sont comme les fragments d'une vie quotidienne en territoire d'absence.
Une seconde caverne apparaît alors, enveloppante, charnelle et cependant réduite à la substance d'un souffle. C'est la "Chambre de la Bouche" où s'effectue la communication d'un sombre et vaporeux message indéchiffrable, tandis que la présence obscure à l'état pur parcourt un labyrinthe d'étroits couloirs et de pièces nues.
Un vaste essaim panique d'oiseaux crieurs formant sa haute constellation d'hiver ponctue cet épisode.
La troisième caverne retrouve l'appartement et ses prestiges nocturnes sur le double mode de l'enfermement et des préparatifs d'une fuite.
Un long thème symphonique se développe alors, itinéraire d'un lent voyage vers des régions indéfinie, amis également approche de la troisième et dernière caverne.
Celle-ci prend l'apparence d'une chambre minérale au centre de laquelle, d'une faille, surgissent en bouillonnant les eaux premières d'une fleuve. Un ultime envoi emblématique ruisselle en ce mouvement dont il traverse le matière en un rebond d'écho sur une tout autre face.
La première d'entre elles coïncide avec l'appartement déjà évoqué dans la partie précédente, appartement auquel s'ajouterait désormais la manifestation sensible de sa puissance de cauchemar. Un thème de retour à l'enfance succède à son paroxysme angoissé, pour aussitôt rejoindre des zones plus ambivalentes qui sont comme les fragments d'une vie quotidienne en territoire d'absence.
Une seconde caverne apparaît alors, enveloppante, charnelle et cependant réduite à la substance d'un souffle. C'est la "Chambre de la Bouche" où s'effectue la communication d'un sombre et vaporeux message indéchiffrable, tandis que la présence obscure à l'état pur parcourt un labyrinthe d'étroits couloirs et de pièces nues.
Un vaste essaim panique d'oiseaux crieurs formant sa haute constellation d'hiver ponctue cet épisode.
La troisième caverne retrouve l'appartement et ses prestiges nocturnes sur le double mode de l'enfermement et des préparatifs d'une fuite.
Un long thème symphonique se développe alors, itinéraire d'un lent voyage vers des régions indéfinie, amis également approche de la troisième et dernière caverne.
Celle-ci prend l'apparence d'une chambre minérale au centre de laquelle, d'une faille, surgissent en bouillonnant les eaux premières d'une fleuve. Un ultime envoi emblématique ruisselle en ce mouvement dont il traverse le matière en un rebond d'écho sur une tout autre face.
jeudi 2 avril 2009
Fleur d'Ivoire : Troisième partie
La troisième partie de Fleur d'Ivoire est placée sous le triple signe de la solitude, de l'arrachement et de l'exil.
Elle s'ouvre par une cérémonie de solitude. Au centre, un événement sonore inattendu surgit soudain de la pénombre silencieuse et fait un court moment ruisseler son emblème scintillant. Il est aussitôt suivi de l'arrachement qui conduit à l'exil en une ville étrangère, Paris dans le roman, puis dans les innombrables pièces d'un immense appartement où des objets composent des collections étranges, presque fantomatiques. La solitude y puise de nouvelle réserves intérieures et s'abandonne pleinement à ses modulations les plus intimes.
Elle s'ouvre par une cérémonie de solitude. Au centre, un événement sonore inattendu surgit soudain de la pénombre silencieuse et fait un court moment ruisseler son emblème scintillant. Il est aussitôt suivi de l'arrachement qui conduit à l'exil en une ville étrangère, Paris dans le roman, puis dans les innombrables pièces d'un immense appartement où des objets composent des collections étranges, presque fantomatiques. La solitude y puise de nouvelle réserves intérieures et s'abandonne pleinement à ses modulations les plus intimes.
lundi 30 mars 2009
Fleur d'Ivoire : Deuxième partie
Tout comme la dernière séquence de la partie précédente, la seconde partie de Fleur d'Ivoire est placée sous le signe de la nuit. Elle s'ouvre sur un jardin. Bientôt apparaît un temple que protègent d'inquiétantes divinités. Surgit ensuite un second thème de déambulation qui nous conduit au coeur d'un jardin de perles dont les sphères luminescentes et les poussières stellaires respirent mystérieusement.
mercredi 25 mars 2009
Fleur d'Ivoire
Cette nouvelle composition - la première partie a été achevée le 24 mars - est née d'un projet longuement prémédité depuis un peu plus d'un an. A l'origine, Fleur d'Ivoire est un roman écrit entre 2006 et 2007 dont le personnage principal est une jeune femme originaire de Hong Kong. Solitaire, égarée dans sa propre étrangeté, elle incarne la figure de la déambulatrice énigmatique. C'est dans le sillage de son errance que se place la pièce qui lui est consacrée, sorte de libre portrait intérieur du mystère d'un être que ses aimantations intimes font successivement apparaître et disparaître dans l'immense nébuleuse des deux villes, Hong Kong et Paris, où ses pas la conduisent jusqu'au secret de son silence.
La pièce s'ouvre par un dialogue entre plusieurs synthétiseurs composant un jardin de temple. Une seconde séquence articule à cet espace méditatif la frénésie d'une mégapole traduite en un tissage de sons concrets traités à l'ordinateur. La troisième séquence, introduite par une série d'événements abstraits, développe un long thème de nature symphonique enroulé sur lui-même en une lente répétition qui se poursuit jusqu'à son effacement.
La pièce s'ouvre par un dialogue entre plusieurs synthétiseurs composant un jardin de temple. Une seconde séquence articule à cet espace méditatif la frénésie d'une mégapole traduite en un tissage de sons concrets traités à l'ordinateur. La troisième séquence, introduite par une série d'événements abstraits, développe un long thème de nature symphonique enroulé sur lui-même en une lente répétition qui se poursuit jusqu'à son effacement.
lundi 23 mars 2009
dimanche 22 mars 2009
Scansion
Fait rare dans mon travail, cette pièce a été composée en une seule séance, le 22 mars 2009. Généralement, la composition s'effectue sur une plus longue durée, par reprises successives. Lorsque une pièce est achevée, je la réécoute attentivement, de la même façon qu'un peintre examinerait attentivement un tableau qu'il vient de peindre, afin d'en mesurer les manques et les défauts, puis se livrerait à un patient travail de retouches, avant de s'écarter et d'observer à nouveau le résultat de ses corrections et de les poursuivre jusqu'au moment où l'oeuvre atteint son plein équilibre et sa plénitude. Généralement, ce processus exige du temps et ne s'effectue jamais en une seul élan, ne serait-ce que pour éviter la lassitude qu'engendrerait un acharnement stérile.
Dans le cas de Scansion, les choses se sont passées tout autrement. Née sans projet préalable si ce n'est un simple désir de composition, cette pièce s'est esquissée, nourrie de sa substance et achevée toute retouche effectuée en un seul mouvement de création rapide.
Comme d'autres pièces avant elle, Scansion évoque un rituel constistué d'une psalmodie sans texte, et figure à ce titre un parcours intérieur en forme de méditation, d'invocation et d'appel.
Dans le cas de Scansion, les choses se sont passées tout autrement. Née sans projet préalable si ce n'est un simple désir de composition, cette pièce s'est esquissée, nourrie de sa substance et achevée toute retouche effectuée en un seul mouvement de création rapide.
Comme d'autres pièces avant elle, Scansion évoque un rituel constistué d'une psalmodie sans texte, et figure à ce titre un parcours intérieur en forme de méditation, d'invocation et d'appel.
vendredi 20 mars 2009
Radio Klow Project : concert du 20 janvier 2009
Le 20 janvier 2009, à l'invitation de Laurent Rochette, j'ai participé à un concert donné à la salle lyonnaise Grrrd Zero de Gerland.
Plutôt que de proposer une diffusion d'oeuvres déjà composées, j'ai préféré proposer une création originale en semi improvisation assistée par ordinateur sur mes trois synthétiseurs. Quelques éléments musicaux avaient été enregistrés sur logic afin de servir d'accompagnements, d'ornements et de jalons. Seize registres du Virus TI ainsi que quelques entrées de synthétiseurs logiciels ont été présélectionnés dans Logic afin de permettre un circulation parfaitement souple d'un registre à l'autre. J'ai par ailleurs créé plusieurs séries de registres inédits sur mes deux autres synthétiseurs.
Pendant deux mois, j'ai préparé ce concert en esquissant quelques séries de thèmes ouverts à partir desquels je comptais développer mon improvisation.
Le moment venu, un petit incident de câblage a provoqué un silence inopiné à deux reprises dès les premières minutes d'exécution. Perturbé par cet événement, je n'ai finalement pas suivi le plan que je m'étais fixé, improvisant la presque totalité de mon concert, à l'exception de quelques rares passages. Il me semble aujourd'hui, deux mois après ce concert que cet incident, loin de me desservir, m'a permis d'échapper au carcan d'un discours musical trop prémédité au profit d'une forme beaucoup plus libre.
Le présent enregistrement présente l'intégralité de ma participation, dont seuls les instants de silence dus à l'incident initial ont été supprimés. Le mixage et les corrections ont été effectués de main de maître par Laurent Rochette qui prépare actuellement le montage du film tourné au cours du concert.
Plutôt que de proposer une diffusion d'oeuvres déjà composées, j'ai préféré proposer une création originale en semi improvisation assistée par ordinateur sur mes trois synthétiseurs. Quelques éléments musicaux avaient été enregistrés sur logic afin de servir d'accompagnements, d'ornements et de jalons. Seize registres du Virus TI ainsi que quelques entrées de synthétiseurs logiciels ont été présélectionnés dans Logic afin de permettre un circulation parfaitement souple d'un registre à l'autre. J'ai par ailleurs créé plusieurs séries de registres inédits sur mes deux autres synthétiseurs.
Pendant deux mois, j'ai préparé ce concert en esquissant quelques séries de thèmes ouverts à partir desquels je comptais développer mon improvisation.
Le moment venu, un petit incident de câblage a provoqué un silence inopiné à deux reprises dès les premières minutes d'exécution. Perturbé par cet événement, je n'ai finalement pas suivi le plan que je m'étais fixé, improvisant la presque totalité de mon concert, à l'exception de quelques rares passages. Il me semble aujourd'hui, deux mois après ce concert que cet incident, loin de me desservir, m'a permis d'échapper au carcan d'un discours musical trop prémédité au profit d'une forme beaucoup plus libre.
Le présent enregistrement présente l'intégralité de ma participation, dont seuls les instants de silence dus à l'incident initial ont été supprimés. Le mixage et les corrections ont été effectués de main de maître par Laurent Rochette qui prépare actuellement le montage du film tourné au cours du concert.
vendredi 13 mars 2009
Itinéraires, fin : Accabonac et Kôzan-Ji
Accabonac emprunte son titre à celui de deux tableaux de Willem de Kooning : Woman Accabonac peint en 1966 et Man Accabonac peint en 1971. La référence à l'univers du peintre américain tient avant tout à la matière sonore pulatile, volontiers dissonante et lyrique de cette pièce qui n'est pas non plus sans évoquer le Free Jazz, les clameurs stridentes de Manhattan, ainsi qu'une autre forme de Pastorale, moderne, inscrite entre ville et nature dans une série de jaillissements successifs. A ce titre, la pièce aurait aussi bien pu s'intituler selon les titres d'autres oeuvres de l'artiste : Park Rosenberg, Gotham News ou Montauk. Le titre finalement retenu le doit à la scansion précise et dynamique de ses syllabes primitives qui semblent provenir d'une ancienne langue indienne ici figée par l'un de ses mots en un nom de lieu réactivé par son association aux figures édeniques d'une femme et d'un homme violemment sensuels. Le choix d'Accabonac tient aussi à ces deux figures de nymphe et de faune modernes qui pourraient être des baigneurs s'offrant au bourrasques solaires de juillet sur la côte atlantique qu'aimait tant de Kooning. Enfin, Accabonac n'est pas sans lien secret mais non prémédité avec le Fragment 23 : Danse de Pan/Manhattan, que je présenterai par la suite.
Kôzan-Ji est un temple bâti dans la région montagneuse de Taganoo et constitue l'un des sites de Kyoto que l'Unesco a classé au patrimoine mondial de l'humanité en 1994. Il possède le plus ancien "jardin de thé" du Japon. véritable balcon en forêt bouddhiste, Kôzan-Ji plus que tout autre temple de Kyoto convenait à la conclusion d'Itinéraires, par son calme, la fraîcheur des verts profonds qui filtrent et distribuent la lumière, ses allées mouillées d'averses scintillantes et ses coursives donnant sur ses paysages recueillis où la pensée se laisse guider en un mouvement indéfini de pure présence contemplative.
Kôzan-Ji est un temple bâti dans la région montagneuse de Taganoo et constitue l'un des sites de Kyoto que l'Unesco a classé au patrimoine mondial de l'humanité en 1994. Il possède le plus ancien "jardin de thé" du Japon. véritable balcon en forêt bouddhiste, Kôzan-Ji plus que tout autre temple de Kyoto convenait à la conclusion d'Itinéraires, par son calme, la fraîcheur des verts profonds qui filtrent et distribuent la lumière, ses allées mouillées d'averses scintillantes et ses coursives donnant sur ses paysages recueillis où la pensée se laisse guider en un mouvement indéfini de pure présence contemplative.
Itinéraires, suite : Pastorale et Lentement vers le Nord
Pastorale se situerait sans doute dans une autre Méditerranée, celle de la Grèce Antique et de ses Mystères, rituels où l'incantatoire et le ravissement bucolique n'excluent pas des surgissements plus violents et obscurs aux masques dissonants.
Lentement vers le Nord emprunte son titre à une toile d'Yves Tanguy évocatrice du magnétisme polaire qui de Jules Verne à Henri Michaux a fasciné des générations de lecteurs, de rêveurs, de voyageurs et d'écrivains captivés par l'appel du haut lieu absolu qu'est le pôle nord. Les obsédantes aventures du capitaine Hatteras ont évidement nourri cet imaginaire que dans mon cas, la vision à l'âge de six ans d'un film en noir et blanc de Paul Emile Victor consacré au grand nord a subitement éveillé au point où du jour au lendemain mes jeux en cours de récréation se sont spontanément appliqué à revivre les situations présentées par ce film. A cette époque, Indiens du nord canadien et Eskimos vivaient encore de manière traditionnelle et, à l'exception de fusils, ne possédaient aucun objet moderne, outil, instrument, moyen de transport ou vêtement. Le noir et blanc ajoutait à ce sentiment de monde immémorial, tout comme une fabuleuse séquence montrant un troupeau de boeuf musqué tous droits sortis de la préhistoire, formant un cercle protecteur contre le blizzard et les attaques de loups. A cela devait s'ajouter beaucoup plus tard, à la fin, de mon adolescence, l'attraction immédiate exercée sur moi par Icebergs, poème de La Nuit remue où Henri Michaux s'exclame notamment : "Icebergs, Icebergs, dos du Nord-Atlantique, augustes Bouddhas gelés sur des mers incontemplées."
Lentement vers le Nord emprunte son titre à une toile d'Yves Tanguy évocatrice du magnétisme polaire qui de Jules Verne à Henri Michaux a fasciné des générations de lecteurs, de rêveurs, de voyageurs et d'écrivains captivés par l'appel du haut lieu absolu qu'est le pôle nord. Les obsédantes aventures du capitaine Hatteras ont évidement nourri cet imaginaire que dans mon cas, la vision à l'âge de six ans d'un film en noir et blanc de Paul Emile Victor consacré au grand nord a subitement éveillé au point où du jour au lendemain mes jeux en cours de récréation se sont spontanément appliqué à revivre les situations présentées par ce film. A cette époque, Indiens du nord canadien et Eskimos vivaient encore de manière traditionnelle et, à l'exception de fusils, ne possédaient aucun objet moderne, outil, instrument, moyen de transport ou vêtement. Le noir et blanc ajoutait à ce sentiment de monde immémorial, tout comme une fabuleuse séquence montrant un troupeau de boeuf musqué tous droits sortis de la préhistoire, formant un cercle protecteur contre le blizzard et les attaques de loups. A cela devait s'ajouter beaucoup plus tard, à la fin, de mon adolescence, l'attraction immédiate exercée sur moi par Icebergs, poème de La Nuit remue où Henri Michaux s'exclame notamment : "Icebergs, Icebergs, dos du Nord-Atlantique, augustes Bouddhas gelés sur des mers incontemplées."
jeudi 12 mars 2009
Itinéraires, suite : Kitab Jallah et La Seu
Dans le même esprit que les deux premières pièces de la série Itinéraires, Kitab Jallah et La Seu composent deux nouvelles étapes en forme d'invitation et de voyage intérieur, celle de l'Islam soufi et celle de la mystique chrétienne. Kitab Jallah ouvre ce parcours des monothéisme par son titre à double fond qui désigne à la fois le "livre de l'épiphanie" et le nom à l'envers du poète Hallaj, grand spirituel fondamental du monde arabo-musulman. L'auditeur traverse tout d'abord l'espace humain de la ville orientale qui le conduit insensiblement à celui, plus intime d'un rituel, selon le principe de continuité souple entre profane et sacré qui caractérise le soufisme.
La Seu, terme catalan, désigne ici de façon solennelle et familière la cathédrale de Palma de Majorque, deuxième église d'Espagne et surprenant vaisseau fortifié dominant la ville et son port. Au sein de ses murailles s'ouvrent d'immenses espaces de luminosité tremblée à la feuille d'or et de pénombre substantielle. On y songe au somptueux prologue de la Duchesse de Langeais, tout en s'abandonnant aux suggestions des psalmodies architecturales déployées vers les quatre horizons diurnes et nocturnes de la verticalité pure.
La Seu, terme catalan, désigne ici de façon solennelle et familière la cathédrale de Palma de Majorque, deuxième église d'Espagne et surprenant vaisseau fortifié dominant la ville et son port. Au sein de ses murailles s'ouvrent d'immenses espaces de luminosité tremblée à la feuille d'or et de pénombre substantielle. On y songe au somptueux prologue de la Duchesse de Langeais, tout en s'abandonnant aux suggestions des psalmodies architecturales déployées vers les quatre horizons diurnes et nocturnes de la verticalité pure.
Itinéraires : Traversées et Man Mo
Deux pièces récentes sont proposées à l'écoute. Elles ont été composées fin 2008 et appartiennent à un cycle intitulé : Itinéraires. L'idée de voyage, de visite aux espaces symboliques des cultures lointaines en sous tend le devenir. Traversées, première pièce de ce nouveau cycle en indique symboliquement l'esprit : celui d'un départ et d'une croisière au-delà des horizons visibles, vers les régions de l'infini. Le navire ayant quitté le port s'engage dans des zones de lumière où règnent l'espace et le seul mouvement de son avancée parmi les souffles. On pourrait songer au Cargo noir de Raoul Dufy, sans l'allusion funèbre contenue dans le titre de cette toile, ou à la série Le Volturno de Pierre Alechinsky, au fil de laquelle le spectateur suit l'itinéraire de haute mer d'un mystérieux navire. Man Mo constitue la première escale de ce périple musical. Il s'agit d'un temple taoiste situé à Hong Kong, remarquable pour les immenses spirales d'encens suspendues comme des lampadaires sous ses plafonds. Multiples et très longues à se consumer - une semaine au moins est nécessaire à la disparition de chacune d'entre elles, selon les informations que j'ai pu lire dans un guide de voyage - , elles répandent un épais voile de fumée odorante à travers le temple dont l'espace se trouve ainsi approfondi et démultiplié. La pièce musicale correspondante exprime cette architecture nébuleuse traversée de scintillements et des résonances imaginées d'un rituel. Tout comme les Fragments, ces deux pièces ne se veulent pas descriptives mais souhaitent plutôt communiquer à l'auditeur l'état poétique dont elles sont nées, celui d'une rêverie nomade née dans la clôture d'une chambre de composition. Leur intention ne doit pas être prise comme programme mais comme incitation à suivre un libre itinéraire de la subjectivité voyageuse.
Quatre autres Fragments
Dans cette seconde série de quatre pièces extraites des Fragments se retrouve le sens du sacré et de l'énigme poétique évoqué précédemment. Le Fragment 3 : Un papillon dort sur la cloche du temple (Haïku d’Issa), introduit pour la première fois la présence des saisons en référence au célèbre haïku d'été du poète Issa : le monde, plongé dans l'immobilité d'une chaude après-midi lumineuse atteint la plénitude d'un équilibre pur que signent au noyau du silence quelques échos et vibrations ténus.
Le Fragment 8 : Nuits d’hiver situe lui aussi, mais secrètement, l'écoute de l'auditeur dans la nature japonaise, cette fois plongée dans l'enchantement surnaturel d'un ermitage hivernal.
Le Fragment 19 : Méditation, et le Fragment 20 : Jardin féminaire, complètent cette nouvelle série, selon le principe du mystère manifesté sans être dévoilé.
Le Fragment 8 : Nuits d’hiver situe lui aussi, mais secrètement, l'écoute de l'auditeur dans la nature japonaise, cette fois plongée dans l'enchantement surnaturel d'un ermitage hivernal.
Le Fragment 19 : Méditation, et le Fragment 20 : Jardin féminaire, complètent cette nouvelle série, selon le principe du mystère manifesté sans être dévoilé.
Quelques Fragments dans le désordre
Les Fragments, dont je présente ici une première série d'exemples désordonnés, consistent en un ensemble de 24 courtes pièces, soit deux cahiers de 12, en relation avec les vingt quatre heures du jour et les douze mois de l'an. Composés entre janvier et août 2008, ils sont nés de l'acquisition des outils du GRM et des premiers essais effectués à l'aide de ces logiciels passionnants et surprenants. Chacun des Fragments exprime un certain climat intérieur, lié aux saisons, à leur manifestation poétique en des lieux donnés, réels ou imaginaires, mais aussi parfois, d'une façon plus générale, un sentiment cosmique du monde en ses états présents, quelquefois sa ou ses genèses depuis les premiers instants de l'arrière-univers précédant le Big Bang des théories modernes jusqu'au chant de l'homme interrogeant et célébrant l'énigme de l'être. Les quelques Fragments présentés actuellement sur cette page (d'autres prendront ensuite leur place) relèvent de ces deux catégories. C'est volontairement que je n'ai pas tenu compte de leur ordre de numérotation à l'intérieur de l'ensemble dont ils proviennent. Chacun est accompagné moins d'un titre que d'un indication générale pouvant comporter plusieurs éléments, indiquant leur esprit ou intention poétique, sans constituer pour autant un programme obligé, l'auditeur pouvant parfaitement substituer la rêverie de sa propre réception à la mienne. Au fil de leur composition, il m'est apparu que souvent l'inspiration des Fragments puisait ses images fondamentales dans la culture japonaise, qu'ils 'agisse de la musique, de la poésie ou de l'art du paysage. De fait, les Fragments me sont après coup apparus comme des sortes de haïkus sonores, en raison même de leur relative brièveté, entre un peu plus d'une minute et environ sept minutes. Enfin, souvent, leur forme et leur substances expriment de façon spontanée la notion de rituel, expression musicale de notre condition métaphysique sous la forme de l'interrogation et de la célébration. Le sens du sacré qui en émane demeure à la mesure de l'homme confronté au mystère et à la présence, dans le tremblement de sa question. Cette dimension apparaît également dans les Fragments actuellement proposés à l'écoute. Le Fragment 17 propose d'explorer le coeur secret du monde : Naissance de la lumière/jaillissement de couleurs. Le Fragment 22 relève du même registre cosmique : Trois lignes de lumière/Récitation d'un rituel à la lisière du monde. Le Fragment 2 évoque l'univers japonais : Dans la chaleur/jardin de temple. Le Fragment 14 enfin revient au thème cosmique et ontologique : Comme un éveil/en direction du bleu avec une courbe d'altitude.
mardi 3 mars 2009
dimanche 1 mars 2009
Premier Royaume
Premier Royaume est légèrement antérieur au Royaume de Morphée dont il a inspiré le principe général. Mais, à la différence du Royaume de Morphée, cette composition ne se veut pas l'évocation plus ou moins libre de l'univers intérieur d'un roman. Le premier royaume est en effet royaume de l'ouïe par quoi se tisse initialement notre relation sensible avec le monde. L'écoute est tout d'abord éveil, perception d'une durée intérieure qui s'ouvre peu à peu, entre en résonance avec l'espace et les présences d'un univers externe, vient à lui dans la pleine lumière de la vision et naît à l'existence, selon tous les registres de humains, de la comptine aux mélopées d'éros et aux modulations d'énigme vibrant à fleur de monde.
samedi 28 février 2009
Le Royaume de Morphée : Sixième partie
La sixième et dernière partie est à la mesure infinie du Royaume de Morphée et surtout de l'inachèvement magique du roman : la récit n'a en effet pas de véritable terme puisque le narrateur prend congé du lecteur en évoquant les voyages innombrable qui restent encore à accomplir au sein du monde souterrain aussi vaste que celui de notre terre familière et de son univers démesuré, davantage même si l'on songe que le séjour de l'imaginaire et du rêve n'a évidemment aucune limite possible et contient autant d'infinis qu'il est lui-même dilaté à l'infini. La sixième partie est donc un envoi célébrant la perspective de ces périples inépuisables. Moins qu'une conclusion, elle achève donc la composition par l'ouverture du horizon indéfini où s'enfonce avec douceur la substance sonore qui s'interrompt moins en lui qu'elle ne s'y fond pour continuer au-delà de sa ligne acoustique son éternel voyage. Tout comme les sons engloutis dans l'océan continuent de se propager et de vivre sans fin, secrètement, selon ce qu'écrit le compositeur britannique Gavin Bryars dans le livret accompagnant son oeuvre étrange et fascinante : The Sinking of the Titanic. Sauf qu'au Royaume de Morphée, point n'est besoin de naufrage ni d'engloutissement pour que soit garantie l'énigmatique rémanence de la musique de l'autre côté de son horizon grand ouvert.
Le Royaume de Morphée : Cinquième partie
La cinquième partie s'éloigne à nouveau du jeu des références possibles au roman de Steven Millauser dont elle se contente de suivre la courbe et d'épouser la substance poétique. Cependant, elle ne reste pas entièrement étrangère à ses aventures, en se plaçant dans le registre des voyages accomplis par Morphée et le narrateur héros du roman à l'intérieur du monde souterrain aux peuples aussi nombreux qu'étranges. Alors, au cours de certaines séquences qu'il appartient à l'auditeur de deviner ou de supposer selon son bon plaisir, elle devient l'expression de ces civilisations surprenantes, puis le quitte afin de reprendre son voyage dans le libre infini de l'univers morphique.
Le Royaume de Morphée : Quatrième partie
La quatrième partir du Royaume de Morphée se rapproche pendant une courte séquence de certains moments précis du roman dont la seconde phase est consacrée à l'exploration du palais de Morphée et développe une série de récits empruntant leur climat et leur style à diverses périodes et divers mythes de la littérature européenne. Morphée conduit notamment le narrateur et héros du roman dans sa galerie de peinture qui présente la particularité d'être constituée de tableaux aux personnages doués de vie. Cette étrange galerie et le jeu des multiples récits est exprimée musicalement par une nuée de fragments sonores qui sont autant de citations déformées et incomplètes d'oeuvres musicales célèbres appartenant à la tradition communément désignée par le terme général et ambigu de "musique classique".
Le Royaume de Morphée : Troisième partie
La Troisième partie du Royaume de Morphée n'est plus tout à fait la descente initiale mais une première exploration des espaces intérieurs qui s'ouvrent devant les pas du voyageur sans que le lien avec les étapes du roman soit nettement fixé. A la mesure du livre, elle se situe donc dans un espace flottant où surgissent les événement sonores de la même façon que lieux et personnages apparaissent au fil du récit, dans un climat de rêve éveillé, d'exaltation de l'imaginaire; Moins encore que dans les parties précédentes, le tissu musical ne coïncide avec exactitude et précision avec tel ou tel passage, telle ou telle anecdote. C'est un pur voyage d'exploration qui est proposé au voyageur auditeur, même si certains moments pourraient éventuellement se relier à certaines des situations de la belle fiction proliférante à laquelle nous invite Steven Millhauser. Ainsi, vers 7 minutes environ, on pourrait songer à la caverne où bruissent des ombres chuchotantes. Mais tout cela est délibérément flou et mélangé.
Le Royaume de Morphée : Deuxième partie
Les deux premières parties du Royaume de Morphée correspondent à la première étape du roman, longue descente au cours de laquelle le narrateur quitte le monde de la banalité solaire contemporaine pour s'enfoncer inopinément dans le dédale du monde morphique jusqu'à la chambre centrale du palais où dort profondément le maître du royaume. Encore une fois, il ne s'agit pas de figurer musicalement des scènes précises et des situations plutôt que de suivre l'élan de cette lente plongée au centre de ce qui se révélera par la suite être une autre monde complet, avec son ciel, ses astres, son océan et ses terres.
La descente s'effectue selon de vastes courbes infiltrées au coeur d'une matière noire où naissent peu à peu lueurs troubles, présences diffuses, échos et espaces démesurément déployés. L'auditeur peut éventuellement faire la lecture du roman de Steven Millhauser afin de rêver ensuite à sa guise la matière musicale de cette composition, ou se contenter de ces quelques éléments d'information et suivre par lui même, sans autre secours les suggestions immédiates des six parties du Royaume de Morphée.
La descente s'effectue selon de vastes courbes infiltrées au coeur d'une matière noire où naissent peu à peu lueurs troubles, présences diffuses, échos et espaces démesurément déployés. L'auditeur peut éventuellement faire la lecture du roman de Steven Millhauser afin de rêver ensuite à sa guise la matière musicale de cette composition, ou se contenter de ces quelques éléments d'information et suivre par lui même, sans autre secours les suggestions immédiates des six parties du Royaume de Morphée.
Le Royaume de Morphée : Première partie
La composition du Royaume de Morphée est légèrement antérieure à celle de la Messe Anubienne puisque elle remonte à novembre 2007. Elle pourrait être présentée comme un voyage intérieur au pays des infra-sons. Mais elle trouve son origine dans le roman éponyme de l'écrivain américain Steven Millhauser, beaucoup moins connu en France que quelques uns de ses contemporains tels que Paul Auster et Don De Lillo, et pourtant auteur d'une oeuvre exceptionnelle tant par son originalité absolue que son immense qualité littéraire. Le Royaume de Morphée est un roman feuilleté de multiples registres autour du thème central d'un voyage au pays du sommeil et des chimères où trône le truculent personnage de Morphée. Le narrateur, sorte de Gulliver américain du monde des profondeurs oniriques passe de manière presque directe de la banalité d'une après-midi de détente dans un parc public au coeur d'une grande ville moderne à l'improbable pays de Morphée par l'intermédiaire d'une caverne dissimulée derrière des buissons. Odyssée de l'imaginaire souterrain, Mille et une nuits d'un nouveau genre, le Royaume de Morphée est sans doute, au centre de l'oeuvre de Millhauser un chef d'oeuvre majeur et un carrefour à partir duquel le lecteur peut circuler dans toutes les directions à l'intérieur des univers variés créés par l'écrivain au fil de ses romans et de ses nouvelles. C'est là en tout cas un de ces ouvrages merveilleusement et monstrueusement uniques qui, dès leurs premières lignes, se distinguent en tout de la production courante à laquelle nous a souvent habitués la littérature contemporaine. Dans cette composition qui est à la fois un hommage et un voyage au sein du roman de Millhauser, je n'ai pas cherché à décrire vainement des situations narratives plutôt qu'à exprimer les climats poétiques auxquels celles-ci correspondent.
vendredi 27 février 2009
Messe Anubienne : Cinquième Partie
La cinquième et dernière partie de la Messe Anubienne retrouve la structure de la première, mais à l'inverse en ce sens que le cheminement à travers les déserts va de l'abstraction sonore à une conclusion plus harmonique introduite à mi parcours par une nouvelle entrée des percussions. Mais, au lieu d'annoncer la séparation de l'âme et du corps, dans un registre sombre, elle introduit au contraire avec frénésie le rituel de la présentation, sur le modèle de la comparution spirituelle exposée dans le Livre des morts égyptien. Le retour de la forme harmonique étirée en nappes souligne l'expectative de la pesée avant que les percussions scintillantes de la liesse n'exultent au moment de l'acceptation. La Messe Anubienne s'achève dans ce paroxysme de sonneries exubérantes, à l'exact opposé des roulements funèbres de son ouverture.
Le parcours de l'âme peu à peu dépouillée de ses attributs terrestres y correspond à celui des substances sonores concassées jusqu'à leurs particules, particulièrement dans la quatrième partie et le début de la cinquième partie, tandis que naissent de ces débris de nouvelles configurations rayonnantes, rendues possibles par la traversée de l'âpreté. La Messe Anubienne est donc la quête de cette abstraction pure sous ses deux formes ascétique et jubilatoire, développée sur la longue durée d'une cérémonie qui est aussi un itinéraire (environ une heure).
Le parcours de l'âme peu à peu dépouillée de ses attributs terrestres y correspond à celui des substances sonores concassées jusqu'à leurs particules, particulièrement dans la quatrième partie et le début de la cinquième partie, tandis que naissent de ces débris de nouvelles configurations rayonnantes, rendues possibles par la traversée de l'âpreté. La Messe Anubienne est donc la quête de cette abstraction pure sous ses deux formes ascétique et jubilatoire, développée sur la longue durée d'une cérémonie qui est aussi un itinéraire (environ une heure).
Messe Anubienne : Quatrième Partie
La quatrième partie de la Messe Anubienne retrouve la longue durée des deux premières. Elle est la véritable traversée des déserts successifs dont le marécage de la troisième partie n'était qu'un seuil, un no man's land intermédiaire. Stricts déserts de la calcination, des pierres et de la nudité. Ils sont parfois hantés de vents portant des aboiements fantômes, des mélopées errantes au sein du vide. En eux s'opèrent les dépouillements de l'âme réduite au presque rien.
Messe Anubienne : Troisième Partie
La troisième partie de la messe Anubienne est un nouveau seuil : celui des déserts où l'âme de Djinn doit faire l'épreuve de la traversée du non-être, de l'informel et de l'infra substance. Le premier d'entre eux est tout naturellement une sorte de marécage peuplé d'une vie élémentaire fantomatique qui évoque également les boues primordiales du monde naissant.
Il est maintenant temps de préciser que, malgré les apparences, la Messe Anubienne ne se veut pas un écho ou un hommage au voyage de Pierre Henry pas plus qu'à son Livre des morts égyptien, malgré toute l'admiration que j'éprouve envers lui. C'est en effet le hasard de la perte d'un animal, le chien de mon ami le plus intime, que nous promenions régulièrement, habitant le même quartier, qui a, comme je l'ai déjà mentionné, donné naissance à cette pièce. Le lien symbolique de Djinn avec Anubis, le chagrin de mon ami et de sa compagne, le sentiment que les animaux ont eux aussi droit à une considération métaphysique et à une fraternité discrète, sans sensiblerie, m'ont inspiré le désir d'exprimer musicalement le mystérieux voyage d'un défunt non humain, à travers une cérémonie rituelle en forme de messe. Je me suis ainsi placé dans le même état d'esprit que saint François d'Assise pour lequel il n'y a pas de hiérarchie entre les créatures.
Parallèlement, la Messe Anubienne a été pour moi l'occasion d'avancer graduellement en direction d'une musique purement abstraite à partir d'une conception harmonique plus traditionnelle, le rituel de libération consistant aussi en cette mue sonore qui commence de se produire dès la première partie aux environs de la douzième minute. A ce titre, la Messe Anubienne est donc le rituel d'une métamorphose musicale.
Il est maintenant temps de préciser que, malgré les apparences, la Messe Anubienne ne se veut pas un écho ou un hommage au voyage de Pierre Henry pas plus qu'à son Livre des morts égyptien, malgré toute l'admiration que j'éprouve envers lui. C'est en effet le hasard de la perte d'un animal, le chien de mon ami le plus intime, que nous promenions régulièrement, habitant le même quartier, qui a, comme je l'ai déjà mentionné, donné naissance à cette pièce. Le lien symbolique de Djinn avec Anubis, le chagrin de mon ami et de sa compagne, le sentiment que les animaux ont eux aussi droit à une considération métaphysique et à une fraternité discrète, sans sensiblerie, m'ont inspiré le désir d'exprimer musicalement le mystérieux voyage d'un défunt non humain, à travers une cérémonie rituelle en forme de messe. Je me suis ainsi placé dans le même état d'esprit que saint François d'Assise pour lequel il n'y a pas de hiérarchie entre les créatures.
Parallèlement, la Messe Anubienne a été pour moi l'occasion d'avancer graduellement en direction d'une musique purement abstraite à partir d'une conception harmonique plus traditionnelle, le rituel de libération consistant aussi en cette mue sonore qui commence de se produire dès la première partie aux environs de la douzième minute. A ce titre, la Messe Anubienne est donc le rituel d'une métamorphose musicale.
Messe Anubienne : Deuxième Partie
La seconde partie de la Messe Anubienne quitte le domaine liturgique pour suivre l'âme dans son voyage vers l'autre monde. Le périple s'ouvre symboliquement par une figure musicale de la traversée du fleuve des morts et se poursuit à travers les premières régions ontologiques de sa métamorphose et de sa mise à l'épreuve. Il lui faudra franchir une succession de déserts ontologiques afin qu'elle se dépouille de ses attaches terrestres et puisse comparaître devant le tribunal qui procédera à sa pesée, sur le modèle du Livre des morts égyptien. Dans cette première phase, l'âme est environnée de présences énigmatiques suscitées par son passage et d'apparences scintillantes. La seconde partie s'achève par un retour de la figure musicale exprimant la traversée à bord de la barque spirituelle. L'âme a alors atteint l'autre rive où commencera véritablement son expérience des déserts.
jeudi 26 février 2009
Messe Anubienne : Première Partie
J'ai composé la Messe Anubienne en décembre 2007, à la mémoire d'un ami canin répondant au nom de Djinn. D'accord avec le principe du poète Salah Stétié, selon lequel il ne saurait y avoir de Paradis sans chats, j'ai associé les chiens à cet impératif métaphysique, d'autant plus aisément que le nom de Djinn, tout comme la couleur noire de l'animal parlaient en la faveur de cette destination spirituelle. La Messe Anubienne s'ouvre donc, à la façon d'une liturgie de deuil par une longue déploration chorale. Des salves de percussions viennent cependant interrompre ce chant funèbre et annoncer le processus de séparation de l'âme qui dès lors, subissant cette métamorphose essentielle va se révéler dans son mystère ontologique. La première partie s'achève par un retour au choeur initial dont la déploration devient méditation et célébration plus apaisée, bercement pour accompagner la libération de l'âme du défunt doublement placé sous le signe d'Anubis. L'ensemble de la Messe Anubienne a été composé sur un synthétiseur Virus TI. Les sons que l'auditeur peut entendre sont tous des créations originales à partir des banques contenues par l'instrument.
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