samedi 28 février 2009
Le Royaume de Morphée : Sixième partie
La sixième et dernière partie est à la mesure infinie du Royaume de Morphée et surtout de l'inachèvement magique du roman : la récit n'a en effet pas de véritable terme puisque le narrateur prend congé du lecteur en évoquant les voyages innombrable qui restent encore à accomplir au sein du monde souterrain aussi vaste que celui de notre terre familière et de son univers démesuré, davantage même si l'on songe que le séjour de l'imaginaire et du rêve n'a évidemment aucune limite possible et contient autant d'infinis qu'il est lui-même dilaté à l'infini. La sixième partie est donc un envoi célébrant la perspective de ces périples inépuisables. Moins qu'une conclusion, elle achève donc la composition par l'ouverture du horizon indéfini où s'enfonce avec douceur la substance sonore qui s'interrompt moins en lui qu'elle ne s'y fond pour continuer au-delà de sa ligne acoustique son éternel voyage. Tout comme les sons engloutis dans l'océan continuent de se propager et de vivre sans fin, secrètement, selon ce qu'écrit le compositeur britannique Gavin Bryars dans le livret accompagnant son oeuvre étrange et fascinante : The Sinking of the Titanic. Sauf qu'au Royaume de Morphée, point n'est besoin de naufrage ni d'engloutissement pour que soit garantie l'énigmatique rémanence de la musique de l'autre côté de son horizon grand ouvert.
Le Royaume de Morphée : Cinquième partie
La cinquième partie s'éloigne à nouveau du jeu des références possibles au roman de Steven Millauser dont elle se contente de suivre la courbe et d'épouser la substance poétique. Cependant, elle ne reste pas entièrement étrangère à ses aventures, en se plaçant dans le registre des voyages accomplis par Morphée et le narrateur héros du roman à l'intérieur du monde souterrain aux peuples aussi nombreux qu'étranges. Alors, au cours de certaines séquences qu'il appartient à l'auditeur de deviner ou de supposer selon son bon plaisir, elle devient l'expression de ces civilisations surprenantes, puis le quitte afin de reprendre son voyage dans le libre infini de l'univers morphique.
Le Royaume de Morphée : Quatrième partie
La quatrième partir du Royaume de Morphée se rapproche pendant une courte séquence de certains moments précis du roman dont la seconde phase est consacrée à l'exploration du palais de Morphée et développe une série de récits empruntant leur climat et leur style à diverses périodes et divers mythes de la littérature européenne. Morphée conduit notamment le narrateur et héros du roman dans sa galerie de peinture qui présente la particularité d'être constituée de tableaux aux personnages doués de vie. Cette étrange galerie et le jeu des multiples récits est exprimée musicalement par une nuée de fragments sonores qui sont autant de citations déformées et incomplètes d'oeuvres musicales célèbres appartenant à la tradition communément désignée par le terme général et ambigu de "musique classique".
Le Royaume de Morphée : Troisième partie
La Troisième partie du Royaume de Morphée n'est plus tout à fait la descente initiale mais une première exploration des espaces intérieurs qui s'ouvrent devant les pas du voyageur sans que le lien avec les étapes du roman soit nettement fixé. A la mesure du livre, elle se situe donc dans un espace flottant où surgissent les événement sonores de la même façon que lieux et personnages apparaissent au fil du récit, dans un climat de rêve éveillé, d'exaltation de l'imaginaire; Moins encore que dans les parties précédentes, le tissu musical ne coïncide avec exactitude et précision avec tel ou tel passage, telle ou telle anecdote. C'est un pur voyage d'exploration qui est proposé au voyageur auditeur, même si certains moments pourraient éventuellement se relier à certaines des situations de la belle fiction proliférante à laquelle nous invite Steven Millhauser. Ainsi, vers 7 minutes environ, on pourrait songer à la caverne où bruissent des ombres chuchotantes. Mais tout cela est délibérément flou et mélangé.
Le Royaume de Morphée : Deuxième partie
Les deux premières parties du Royaume de Morphée correspondent à la première étape du roman, longue descente au cours de laquelle le narrateur quitte le monde de la banalité solaire contemporaine pour s'enfoncer inopinément dans le dédale du monde morphique jusqu'à la chambre centrale du palais où dort profondément le maître du royaume. Encore une fois, il ne s'agit pas de figurer musicalement des scènes précises et des situations plutôt que de suivre l'élan de cette lente plongée au centre de ce qui se révélera par la suite être une autre monde complet, avec son ciel, ses astres, son océan et ses terres.
La descente s'effectue selon de vastes courbes infiltrées au coeur d'une matière noire où naissent peu à peu lueurs troubles, présences diffuses, échos et espaces démesurément déployés. L'auditeur peut éventuellement faire la lecture du roman de Steven Millhauser afin de rêver ensuite à sa guise la matière musicale de cette composition, ou se contenter de ces quelques éléments d'information et suivre par lui même, sans autre secours les suggestions immédiates des six parties du Royaume de Morphée.
La descente s'effectue selon de vastes courbes infiltrées au coeur d'une matière noire où naissent peu à peu lueurs troubles, présences diffuses, échos et espaces démesurément déployés. L'auditeur peut éventuellement faire la lecture du roman de Steven Millhauser afin de rêver ensuite à sa guise la matière musicale de cette composition, ou se contenter de ces quelques éléments d'information et suivre par lui même, sans autre secours les suggestions immédiates des six parties du Royaume de Morphée.
Le Royaume de Morphée : Première partie
La composition du Royaume de Morphée est légèrement antérieure à celle de la Messe Anubienne puisque elle remonte à novembre 2007. Elle pourrait être présentée comme un voyage intérieur au pays des infra-sons. Mais elle trouve son origine dans le roman éponyme de l'écrivain américain Steven Millhauser, beaucoup moins connu en France que quelques uns de ses contemporains tels que Paul Auster et Don De Lillo, et pourtant auteur d'une oeuvre exceptionnelle tant par son originalité absolue que son immense qualité littéraire. Le Royaume de Morphée est un roman feuilleté de multiples registres autour du thème central d'un voyage au pays du sommeil et des chimères où trône le truculent personnage de Morphée. Le narrateur, sorte de Gulliver américain du monde des profondeurs oniriques passe de manière presque directe de la banalité d'une après-midi de détente dans un parc public au coeur d'une grande ville moderne à l'improbable pays de Morphée par l'intermédiaire d'une caverne dissimulée derrière des buissons. Odyssée de l'imaginaire souterrain, Mille et une nuits d'un nouveau genre, le Royaume de Morphée est sans doute, au centre de l'oeuvre de Millhauser un chef d'oeuvre majeur et un carrefour à partir duquel le lecteur peut circuler dans toutes les directions à l'intérieur des univers variés créés par l'écrivain au fil de ses romans et de ses nouvelles. C'est là en tout cas un de ces ouvrages merveilleusement et monstrueusement uniques qui, dès leurs premières lignes, se distinguent en tout de la production courante à laquelle nous a souvent habitués la littérature contemporaine. Dans cette composition qui est à la fois un hommage et un voyage au sein du roman de Millhauser, je n'ai pas cherché à décrire vainement des situations narratives plutôt qu'à exprimer les climats poétiques auxquels celles-ci correspondent.
vendredi 27 février 2009
Messe Anubienne : Cinquième Partie
La cinquième et dernière partie de la Messe Anubienne retrouve la structure de la première, mais à l'inverse en ce sens que le cheminement à travers les déserts va de l'abstraction sonore à une conclusion plus harmonique introduite à mi parcours par une nouvelle entrée des percussions. Mais, au lieu d'annoncer la séparation de l'âme et du corps, dans un registre sombre, elle introduit au contraire avec frénésie le rituel de la présentation, sur le modèle de la comparution spirituelle exposée dans le Livre des morts égyptien. Le retour de la forme harmonique étirée en nappes souligne l'expectative de la pesée avant que les percussions scintillantes de la liesse n'exultent au moment de l'acceptation. La Messe Anubienne s'achève dans ce paroxysme de sonneries exubérantes, à l'exact opposé des roulements funèbres de son ouverture.
Le parcours de l'âme peu à peu dépouillée de ses attributs terrestres y correspond à celui des substances sonores concassées jusqu'à leurs particules, particulièrement dans la quatrième partie et le début de la cinquième partie, tandis que naissent de ces débris de nouvelles configurations rayonnantes, rendues possibles par la traversée de l'âpreté. La Messe Anubienne est donc la quête de cette abstraction pure sous ses deux formes ascétique et jubilatoire, développée sur la longue durée d'une cérémonie qui est aussi un itinéraire (environ une heure).
Le parcours de l'âme peu à peu dépouillée de ses attributs terrestres y correspond à celui des substances sonores concassées jusqu'à leurs particules, particulièrement dans la quatrième partie et le début de la cinquième partie, tandis que naissent de ces débris de nouvelles configurations rayonnantes, rendues possibles par la traversée de l'âpreté. La Messe Anubienne est donc la quête de cette abstraction pure sous ses deux formes ascétique et jubilatoire, développée sur la longue durée d'une cérémonie qui est aussi un itinéraire (environ une heure).
Messe Anubienne : Quatrième Partie
La quatrième partie de la Messe Anubienne retrouve la longue durée des deux premières. Elle est la véritable traversée des déserts successifs dont le marécage de la troisième partie n'était qu'un seuil, un no man's land intermédiaire. Stricts déserts de la calcination, des pierres et de la nudité. Ils sont parfois hantés de vents portant des aboiements fantômes, des mélopées errantes au sein du vide. En eux s'opèrent les dépouillements de l'âme réduite au presque rien.
Messe Anubienne : Troisième Partie
La troisième partie de la messe Anubienne est un nouveau seuil : celui des déserts où l'âme de Djinn doit faire l'épreuve de la traversée du non-être, de l'informel et de l'infra substance. Le premier d'entre eux est tout naturellement une sorte de marécage peuplé d'une vie élémentaire fantomatique qui évoque également les boues primordiales du monde naissant.
Il est maintenant temps de préciser que, malgré les apparences, la Messe Anubienne ne se veut pas un écho ou un hommage au voyage de Pierre Henry pas plus qu'à son Livre des morts égyptien, malgré toute l'admiration que j'éprouve envers lui. C'est en effet le hasard de la perte d'un animal, le chien de mon ami le plus intime, que nous promenions régulièrement, habitant le même quartier, qui a, comme je l'ai déjà mentionné, donné naissance à cette pièce. Le lien symbolique de Djinn avec Anubis, le chagrin de mon ami et de sa compagne, le sentiment que les animaux ont eux aussi droit à une considération métaphysique et à une fraternité discrète, sans sensiblerie, m'ont inspiré le désir d'exprimer musicalement le mystérieux voyage d'un défunt non humain, à travers une cérémonie rituelle en forme de messe. Je me suis ainsi placé dans le même état d'esprit que saint François d'Assise pour lequel il n'y a pas de hiérarchie entre les créatures.
Parallèlement, la Messe Anubienne a été pour moi l'occasion d'avancer graduellement en direction d'une musique purement abstraite à partir d'une conception harmonique plus traditionnelle, le rituel de libération consistant aussi en cette mue sonore qui commence de se produire dès la première partie aux environs de la douzième minute. A ce titre, la Messe Anubienne est donc le rituel d'une métamorphose musicale.
Il est maintenant temps de préciser que, malgré les apparences, la Messe Anubienne ne se veut pas un écho ou un hommage au voyage de Pierre Henry pas plus qu'à son Livre des morts égyptien, malgré toute l'admiration que j'éprouve envers lui. C'est en effet le hasard de la perte d'un animal, le chien de mon ami le plus intime, que nous promenions régulièrement, habitant le même quartier, qui a, comme je l'ai déjà mentionné, donné naissance à cette pièce. Le lien symbolique de Djinn avec Anubis, le chagrin de mon ami et de sa compagne, le sentiment que les animaux ont eux aussi droit à une considération métaphysique et à une fraternité discrète, sans sensiblerie, m'ont inspiré le désir d'exprimer musicalement le mystérieux voyage d'un défunt non humain, à travers une cérémonie rituelle en forme de messe. Je me suis ainsi placé dans le même état d'esprit que saint François d'Assise pour lequel il n'y a pas de hiérarchie entre les créatures.
Parallèlement, la Messe Anubienne a été pour moi l'occasion d'avancer graduellement en direction d'une musique purement abstraite à partir d'une conception harmonique plus traditionnelle, le rituel de libération consistant aussi en cette mue sonore qui commence de se produire dès la première partie aux environs de la douzième minute. A ce titre, la Messe Anubienne est donc le rituel d'une métamorphose musicale.
Messe Anubienne : Deuxième Partie
La seconde partie de la Messe Anubienne quitte le domaine liturgique pour suivre l'âme dans son voyage vers l'autre monde. Le périple s'ouvre symboliquement par une figure musicale de la traversée du fleuve des morts et se poursuit à travers les premières régions ontologiques de sa métamorphose et de sa mise à l'épreuve. Il lui faudra franchir une succession de déserts ontologiques afin qu'elle se dépouille de ses attaches terrestres et puisse comparaître devant le tribunal qui procédera à sa pesée, sur le modèle du Livre des morts égyptien. Dans cette première phase, l'âme est environnée de présences énigmatiques suscitées par son passage et d'apparences scintillantes. La seconde partie s'achève par un retour de la figure musicale exprimant la traversée à bord de la barque spirituelle. L'âme a alors atteint l'autre rive où commencera véritablement son expérience des déserts.
jeudi 26 février 2009
Messe Anubienne : Première Partie
J'ai composé la Messe Anubienne en décembre 2007, à la mémoire d'un ami canin répondant au nom de Djinn. D'accord avec le principe du poète Salah Stétié, selon lequel il ne saurait y avoir de Paradis sans chats, j'ai associé les chiens à cet impératif métaphysique, d'autant plus aisément que le nom de Djinn, tout comme la couleur noire de l'animal parlaient en la faveur de cette destination spirituelle. La Messe Anubienne s'ouvre donc, à la façon d'une liturgie de deuil par une longue déploration chorale. Des salves de percussions viennent cependant interrompre ce chant funèbre et annoncer le processus de séparation de l'âme qui dès lors, subissant cette métamorphose essentielle va se révéler dans son mystère ontologique. La première partie s'achève par un retour au choeur initial dont la déploration devient méditation et célébration plus apaisée, bercement pour accompagner la libération de l'âme du défunt doublement placé sous le signe d'Anubis. L'ensemble de la Messe Anubienne a été composé sur un synthétiseur Virus TI. Les sons que l'auditeur peut entendre sont tous des créations originales à partir des banques contenues par l'instrument.
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